Guatemala. Un cinquième ancien soldat est reconnu coupable d’avoir participé au massacre de Dos Erres

Le jugement prononcé contre un ancien soldat pour son rôle dans un massacre sanglant perpétré au Guatemala en 1982 est un pas supplémentaire en faveur de la justice pour les nombreuses victimes et leurs proches, a déclaré Amnesty International. Pedro Pimentel Ríos est le cinquième ancien soldat d’une unité d’élite de l’armée guatémaltèque à être condamné à 6 060 ans de prison pour avoir participé à un massacre ayant fait plus de 250 morts dans le village de Dos Erres. Cet homme a été extradé des États-Unis en juillet 2011, un mois après la condamnation de quatre autres soldats de cette unité pour les mêmes faits. Un sixième soldat, Gilberto Jordán, a avoué aux autorités américaines qu’il avait également participé au massacre et avait notamment jeté un bébé dans le puits du village. Il n’a jamais été poursuivi aux États-Unis pour ces meurtres et doit être expulsé vers le Guatemala après avoir purgé aux États-Unis une peine de 10 ans de prison pour infractions à la législation sur l’immigration. « Depuis des décennies, les victimes de graves violations des droits humains, notamment de la tuerie de Dos Erres, réclament justice, vérité et réparations », a expliqué Sebastian Elgueta, spécialiste de l’Amérique centrale à Amnesty International. « Si elles ne concernent qu’une infime partie du grand nombre de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis dans le cadre du conflit qui a ravagé le pays pendant des décennies, les condamnations prononcées dans ces cas sont une étape importante vers la fin de l’impunité pour ces crimes. Plusieurs hauts gradés également responsables doivent cependant encore être traduits en justice. » Le 5 décembre 1982, les membres d’une unité d’élite de l’armée guatémaltèque – connus sous le nom de « kaibiles », et que Pedro Pimentel Ríos a personnellement formés – sont arrivée à Dos Erres, village situé dans le département du Petén, dans le nord du pays, et ont torturé et tué plus de 250 hommes, femmes et enfants pendant trois jours, avant de raser la commune. La plupart des femmes et des jeunes filles ont été violées et de nombreux villageois, des enfants notamment, ont été jetés dans le puits du village. Une commission Vérité soutenue par les Nations unies a établi qu’au cours du conflit interne guatémaltèque, qui a duré 36 ans, quelque 200 000 personnes ont été tuées ou ont « disparu », et que les forces de sécurité ont commis plus de 600 massacres, prenant principalement pour cible les populations indigènes et rurales. Les autorités ont ouvert une enquête sur le massacre de Dos Erres en 1994, mais les dizaines de recours formés par la défense ont fait traîner cette affaire devant les tribunaux pendant des années. Des personnes ayant survécu au massacre ont témoigné lors du procès et avaient précédemment raconté à Amnesty International qu’un responsable de la base militaire locale avait ordonné cette opération pour couvrir le viol d’une femme du village par un militaire. À la suite des condamnations d’août dernier, un anthropologue médicolégal ayant témoigné dans le cadre du procès a reçu une menace de mort. Amnesty International continue à demander la fin de l’impunité pour tous les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis pendant le conflit armé interne au Guatemala. « Si l’on a pu constater de nombreuses avancées ces derniers mois, notamment la décision de traduire en justice Efraín Ríos Montt, ancien chef d’État de facto, pour génocide, il reste beaucoup à faire », a poursuivi Sebastian Elgueta. « Les nombreuses victimes et leurs familles n’auront de cesse de chercher à obtenir justice, vérité et réparations pour les violations systématiques des droits humains commises pendant la guerre civile au Guatemala. »