La violence dans le nord du Mali alimente une crise des droits humains

Les combats entre les militaires maliens et un groupe armé touareg dans le nord ont entraîné une crise des droits humains, a déclaré jeudi 16 février Amnesty International. Des dizaines de personnes ont été tuées depuis l’éclatement des violences il y a un mois, et des milliers de personnes ont quitté le Mali pour se rendre dans les pays voisins, le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie. « Il s’agit de la pire crise des droits humains qu’ait connue le nord Mali depuis vingt ans », a déclaré Gaëtan Mootoo, chercheur d’Amnesty International sur l’Afrique de l’Ouest. « Cette partie du pays connaît depuis des années une absence d’état de droit et la région pourrait être plongée dans le chaos si les combats continuent. » Les affrontements les plus graves ont éclaté le 18 janvier dans la ville d’Alguelhoc, à quelque 750 km au nord-est de Bamako, la capitale du pays. Dans les jours qui ont suivi, des dizaines de soldats et des combattants ont été tués dans des affrontements qui ont opposé les forces armées maliennes et le Mouvement national de libération de l’Azawad, (MNLA), un groupe d’opposition armé touareg. Quelques jours plus tard, des photographies présentant des cadavres de soldats maliens les mains liées derrière le dos ont circulé, ce qui a conduit les autorités à accuser le MNLA d’avoir commis des exécutions extrajudiciaires. Le groupe d’opposition armé a réfuté ces accusations en disant que les militaires étaient morts au combat et que ces photographies avaient été forgées de toutes pièces. Les autorités maliennes ont annoncé qu’elles avaient envoyé une commission d’enquête sur les lieux afin de faire la lumière sur ces événements. « Face à ces versions contradictoires quant à la manière dont ont été tués les soldats photographiés, il est urgent de mener une enquête indépendante et impartiale sur ces faits », a déclaré Gaëtan Mootoo. « Le MNLA doit, par ailleurs, révéler les noms des personnes qu’il a capturées et accorder au Comité international de la Croix-Rouge un accès sans restriction à ces personnes. » Amnesty International appelle également les autorités maliennes à inculper ou à libérer quatre personnes, y compris deux femmes, qui ont été arrêtées dans la ville de Kidal, dans le nord du pays pour avoir apparemment soutenu le MNLA. Ces quatre personnes ont été transférées tôt jeudi matin vers la ville de Gao. Les détenus auraient eu les yeux bandés et auraient été menottés durant ce transfert. La publication des images des soldats tués a provoqué la colère de leurs proches qui ont manifesté publiquement leur protestation à Bamako les 1er et 2 février. Durant ces manifestations, les forces de sécurité maliennes n’ont rien fait pour empêcher la foule en colère d’attaquer des maisons et des biens appartenant à des Touaregs et d’autres groupes ethniques, y compris des Arabes et des Mauritaniens qui vivaient dans la capitale. Cette inaction des forces de sécurité a poussé des milliers de Touaregs et d’autres personnes ciblées en raison de leur « teint clair » à fuir Bamako. Beaucoup ont trouvé refuge dans les pays voisins, le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie. « Toutes ces informations indiquent que les forces de sécurité maliennes n’ont pas voulu ou n’ont pas pu protéger les populations touareg durant les violentes manifestations de Bamako. Les autorités doivent prendre immédiatement des mesures afin d’assurer la protection de toute personne en danger », a conclu Gaëtan Mootoo.