Myanmar. La libération de prisonniers politiques est un grand pas en avant, mais les autorités ne doivent pas s’arrêter là

La libération d’au moins 130 prisonniers politiques au Myanmar vendredi 13 janvier, dont les dissidents bien connus Htay Kywe, U Khun Htun Oo, Min Ko Naing et U Gambira, est une mesure importante, a déclaré Amnesty International.

Cette grâce de prisonniers est la deuxième de l’année et la quatrième sous le gouvernement issu des élections qui se sont tenues au Myanmar, ce qui porte le nombre total de prisonniers politiques remis en liberté à au moins 477.

Toutefois, plus d’un millier de prisonniers politiques seraient toujours derrière les barreaux, dont beaucoup de prisonniers d’opinion. Ces mesures de grâce doivent donc se poursuivre jusqu’à ce que tous soient libérés.

« La libération de ces prisonniers politiques est un très grand pas en avant, mais les portes doivent s’ouvrir plus largement pour tous les prisonniers d’opinion encore incarcérés, a déclaré Benjamin Zawacki, chercheur sur le Myanmar à Amnesty International. « Les autorités du pays doivent aller au bout de leur démarche, une bonne fois pour toutes. »

Amnesty International s’est déclarée préoccupée par le fait que certains prisonniers auraient été libérés sous conditions. L’organisation demande que les prisonniers libérés puissent de nouveau prendre part au processus politique et exercer pleinement leurs droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association.

« Les activités politiques qui ont conduit ces dissidents en prison ont également contribué à la dynamique en faveur du changement qui débouche aujourd’hui sur leur libération, a expliqué Benjamin Zawacki. Les autorités ne doivent pas revenir à la répression, mais poursuivre leur marche en avant. »

Le nombre de prisonniers politiques actuellement incarcérés au Myanmar fait débat, les chiffres avancés par le gouvernement et par certains groupes de l’opposition présentant des différences notables.

Amnesty International engage les autorités du Myanmar à demander l’aide des Nations unies afin de convoquer une commission, incluant la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), chargée de concilier les écarts en termes de chiffres et de définitions.

Le 19 novembre 2011, le président Thein Sein aurait déclaré qu’il « n’était pas d’accord » avec le fait que certains détenus soient considérés comme des prisonniers politiques.

Cependant, son haut conseiller politique, Ko Ko Hlaing, aurait indiqué en octobre 2011 qu’il restait « environ 600 » prisonniers d’opinion au Myanmar – ce qui pourrait correspondre aux 651 prisonniers dont les autorités ont annoncé la libération le 13 janvier. Ko Ko Hlaing a également déclaré que ces écarts dépendaient sans doute « de la définition que l’on donne des prisonniers d’opinion et des prisonniers de droit commun. »

« Le gouvernement du Myanmar, au plus haut niveau, doit reconnaître les emprisonnements politiques. C’est essentiel pour garantir que personne ne soit soumis à une peine de prison inique à l’avenir, en raison d’un désaccord sur ces définitions, a conclu Benjamin Zawacki. « Si l’on peut apprécier la ” qualité ” de cette libération, au final, c’est la quantité qui compte. Si nous saluons la libération de militants pacifiques aussi éminents, nous exhortons les autorités à libérer tous les prisonniers d’opinion encore incarcérés, immédiatement et sans condition. » Complément d’information Htay Kywe et U Gambira ont joué un rôle clé dans la « révolution de safran », en septembre 2007. U Khun Htun Oo est le président du Parti de la ligue des nationalités chans pour la démocratie (SNLD) et Min Ko Naing est l’un des leaders du groupe des Étudiants de la génération 88. Le 16 mai 2011, le gouvernement du Myanmar a annoncé qu’il avait réduit d’un an les peines d’emprisonnement prononcées contre tous les prisonniers à travers le pays et commué toutes les condamnations à mort en détention à perpétuité. Cette mesure s’est traduite par la libération d’au moins 72 prisonniers politiques qui avaient pratiquement purgé leurs peines. Le 12 octobre 2011, le gouvernement a relâché 241 prisonniers politiques dans le cadre d’une amnistie générale concernant 6 359 détenus. Le 2 janvier 2012, toutes les peines d’emprisonnement, à l’exception des peines de détention à perpétuité, ont été réduites de manière variable selon leur durée, et toutes les condamnations à mort ont été commuées en détention à perpétuité. Au moins 34 prisonniers politiques ont été libérés. Du 17 octobre au 4 novembre 2011, Amnesty International a fait signer une pétition pour réclamer la libération de tous les prisonniers d’opinion au Myanmar. Plus de 30 750 personnes dans 77 pays du globe l’ont signée.