Égypte. Arrestation d’un blogueur et militant influent

Les autorités doivent cesser de faire juger des civils par des tribunaux militaires aux pratiques inéquitables, a déclaré Amnesty International lundi 31 octobre après le placement en détention d’un blogueur et militant influent. Alaa Abdel Fattah a comparu devant le parquet militaire dimanche 30 octobre, mais a refusé de répondre aux questions en raison de son opposition à la traduction de civils devant des tribunaux militaires.Le parquet a ordonné son maintien en détention pour 15 jours dans l’attente d’un complément d’enquête. Le militant Bahaa Saber, interrogé en même temps, a lui aussi refusé de répondre aux questions et a été libéré sous caution. Les deux hommes ont dénoncé le fait que l’armée soit chargée de l’enquête sur l’homicide d’au moins 27 personnes, qui a eu lieu le 9 octobre lorsque des soldats et des policiers antiémeutes ont violemment dispersé une action de protestation autour du siège de la télévision d’État, le bâtiment Maspero. Les manifestations avaient été déclenchées par des attaques visant la minorité copte d’Égypte. « L’armée égyptienne a pris part aux violents affrontements qui ont eu lieu lors des manifestations à Maspero, et c’est également elle qui effectue l’enquête sur le carnage qui en a résulté », a déploré Philip Luther, directeur adjoint du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. « Cela est tout à fait inacceptable et soulève des questions cruciales sur l’indépendance et l’impartialité de cette enquête. « Les autorités militaires égyptiennes doivent permettre qu’une enquête indépendante soit menée sur ces homicides si elles souhaitaient réellement que les responsables présumés soient traduits en justice. »Alaa Abdel Fattah et Bahaa Saber ont été accusés d’incitation à la violence contre les forces armées et d’agression envers le personnel militaire lors des manifestations du 9 octobre. Alaa Abdel Fattah est en outre poursuivi pour vol d’armement. Au moins 28 autres civils auraient été arrêtés et inculpés pour leur rôle dans ces manifestations. D’autres personnes seraient recherchées afin d’être entendues par le parquet militaire. « Les tribunaux militaires ne devraient jamais être habilités à enquêter sur des civils ni à les juger », a déclaré Philip Luther. « Le fonctionnement de ces tribunaux est fondamentalement inique, car ils privent les accusés des garanties les plus élémentaires d’équité des procès. » En Égypte, les tribunaux militaires privent ni plus ni moins les accusés du droit d’appel, sans examiner les faits ni les éléments de preuve en rapport avec un cas. Le Conseil suprême des forces armées n’a toujours pas obligé les forces de sécurité à rendre des comptes pour leur recours excessif à la force contre les manifestants de Maspero. Au lieu de cela, elles continuent à assurer que les manifestants ont été à l’origine de la violence, et sévissent contre les personnes critiquant leur réaction aux actions de protestation.