Trois ans de prison pour avoir créé le profil d’un prince marocain sur Facebook

Un ingénieur informaticien de vingt-six ans a été condamné à une peine d’emprisonnement de trois ans et à une amende de 10 000 dirhams (environ 880 euros) pour avoir créé le profil du prince marocain Moulay Rachid sur le site Facebook. Il a été condamné vendredi par un tribunal à Casablanca.

Deux délégués d’Amnesty International ont assisté au procès. L’organisation a déploré le fait que le procès n’ait pas respecté les normes internationales d’équité.

Le prévenu, Fouad Mourtada, a déclaré que deux agents des services de sécurité en civil l’avaient arrêté dans la matinée du 5 février 2008, alors qu’il venait de quitter son domicile pour se rendre à son travail, et l’avaient forcé à monter dans une voiture.

Il dit qu’ils lui ont bandé les yeux et l’ont couvert d’un drap avant de le conduire dans un lieu inconnu où ils l’ont giflé et frappé jusqu’à ce qu’il « avoue » avoir créé un profil du prince sur Facebook pour « se faire des petites amies ».

Le rapport de police officiel indique toutefois que Fouad Mourtada a été interpellé le 6 février. Sa famille n’a été avertie que le 7 février à 17 h 30, alors que la loi marocaine exige qu’une arrestation soit notifiée dès le début de la garde à vue.

Fouad Mourtada a été entendu par un juge d’instruction le 8 février, mais sans avocat. Il a été maintenu en détention jusqu’à son procès le 22 février.

Lors du procès, l’avocat de Fouad Mourtada a demandé au tribunal d’annuler la procédure parce que les droits de son client avaient été bafoués au cours de l’arrestation et de l’interrogatoire. Le tribunal a refusé. Il n’a pas non plus ordonné d’enquête sur les allégations de mauvais traitements.

Fouad Mourtada a été déclaré coupable d’avoir modifié et falsifié des données informatiques et usurpé l’identité d’une personnalité officielle.

Pendant son procès, il a reconnu avoir créé sur Facebook le profil du prince, frère cadet du chef de l’État, le roi Mohammed VI. Mais il a déclaré l’avoir fait par admiration, sans aucune intention de nuire à la monarchie comme l’affirmait l’accusation.

Le ministère public prétendait que Fouad Mourtada voulait tirer un certain bénéfice de son geste puisqu’il avait créé une adresse électronique pour le profil. L’affaire devrait faire l’objet d’un appel.

Amnesty International a demandé aux autorités marocaines de faire en sorte que les allégations de mauvais traitements donnent lieu à une enquête exhaustive et impartiale.


« Toute personne soupçonnée de mauvais traitements doit être traduite en justice,
a déclaré Bénédicte Goderiaux, porte-parole d’Amnesty International. Aucune information extorquée sous la torture ou les mauvais traitements, pas même des “aveux”, ne devrait être retenue à titre de preuve par un tribunal, conformément aux normes internationales, notamment aux traités relatifs aux droits humains auxquels le Maroc est partie.


« Les autorités doivent veiller à ce que Fouad Mourtada bénéficie d’un nouveau procès respectant les normes internationales d’équité ou que sa condamnation soit annulée et qu’il soit remis en liberté. »